MJ : Nono
Après deux semaines de canotage fastidieux et monotone, nous pensions que notre randonnée dans la jungle serait un changement agréable. Nous comprenons rapidement que le crapahut dans ce labyrinthe végétal est tout aussi contraignant et lassant. La bonne nouvelle, c’est que nous n’avons plus le sentiment d’être continuellement épié par les vols de terreurs. Nous sommes épiés, certes, mais par des macaques goguenards qui s’amusent de nos efforts. Parfois, leur mépris devient si intense qu’ils nous jettent des pierres, en restant toutefois à une distance raisonnable. La plupart du temps ils nous observent placidement depuis les hauteurs.
C’est d’ailleurs dans les hauteurs que nous découvrons le campement de la guerrière Majera et de ses deux acolytes Chultiens. Cette plateforme construite dans les arbres est un avant-poste du camp Vengeance à partir de laquelle ils mènent leur chasse aux morts-vivants. Ils espèrent ainsi assainir la jungle. Nous admirons leur abnégation mais nous avons le sentiment que c’est une mission aussi dérisoire et absurde que de tenter de vider un lac avec une cuillère.
Nous découvrons également le campement et les restes d’aventuriers ou de chasseurs malchanceux dont la jungle a eu raison. Nous prenons alors le temps d’offrir à ces malheureux une sépulture digne et les sacrements d’usages.
Aujourd’hui, nous avons été pris à partie par une meute composée d’une douzaine de vélociraptors. Ces bestioles sont petites, très vives et furieusement agressives. Nous les avons défait sans difficulté mais nous avons subi néanmoins de nombreuses griffures et morsures. Nous nous consolons en les faisant rôtir. Leur chair est délicieuse. Cela apporte un peu de variété et de saveur à nos rations de voyage.
Encore de la jungle… toujours de la jungle… les jours se suivent, se ressemblent et notre lassitude ne cesse d’augmenter. Ekou commence à s’agacer que nous lui posions encore et toujours la même question : « sommes-nous encore loin ? ».
Nous passons nos nerfs sur un essaim de guêpes géantes qui a eu la malheureuse idée de croiser notre chemin. Prut se lâche, tout feu tout flamme. Il nous gratifie d’un feu d’artifice, d’explosions et de grillage de bestioles.
Aujourd’hui, nous avons aperçu des locaux. Ils se sont enfuit à notre approche et nous n’avons pas réussi à établir le contact. Erevan a remarqué que certains d’entre eux avaient des écailles ici ou là sur le corps. Nous ne savons pas de quoi il retourne mais nous avons tous en tête les anciennes légendes des terribles corruptions ophidiennes. Notre tension monte d’un cran.
Nous arrivons enfin à la rivière qui, d’après notre guide, indique la proximité de notre destination. Les flots furieux ont creusé une ravine profonde mais il y a là un pont de corde qui permet une traversée presque facile. Cette facilité est trompeuse. Une des cordes de soutien est tellement abîmée que, sans réparation, elle aurait cédé en nous envoyant valdinguer dans les flots tumultueux en contrebas.
Nous parvenons au pied des ruines d’Orolunga. C’est une une pyramide à degrés couverte de ronces d’une taille indécente. Au sommet, il y a une entrée qui doit nous conduire à l’oracle d’Ubtao. Les lieux sont déserts et solennels.
Ekou nous annonce qu’il nous faut maintenant réussir les épreuves qui vont déterminer si nous sommes dignes d’accéder à l’oracle. Elle affirme que les épreuves sont différentes pour chaque candidat et que c’est à nous de tracer notre propre chemin. Elle refuse de nous en dire plus.
Nous respectons son silence et nous garderons de même le secret des épreuves. Sachez néanmoins que nous avons peiné comme des diables pour franchir les trois degrés et qu’il a fallu des heures pour nous hisser au sommet de la pyramide.
(à suivre)